Le mensonge
La saleté intérieure
Gains et pertes
Nous mentons pour gagner un avantage ou éviter un désavantage. Pourtant, les retombées finissent par coûter plus cher que le gain initial.
De plus, le mensonge nous interdit l'accès aux bienfaits insoupçonnés de l'honnêteté.
Avant de commettre un mensonge, nous devrions bien réfléchir à cela : on est le principal esclave de ses propres mensonges. Et si un instant suffit pour accomplir le mensonge, son esclavage peut durer longtemps.
Si vous êtes né(e) et vivez dans un monde de menteurs, sachez que mentir n'est pas une chose normale, mais bel et bien nocive, même à “petite dose”.
Ce site n'a aucune vocation à moraliser, il ne fait que suggérer et expliquer. L'idée, c'est qu'en arrivant au bas d'une page, vous bénéficiez d'informations qui vous donnent matière à réflexion.
Une allumette peut suffire à embraser une forêt entière.
De même, un seul mensonge bénin peut suffire à saccager la confiance d'une foule entière.
Faut pas exagérer, un petit mensonge, une fois comme ça, ce n'est pas grand chose !
Même minuscule, un trou dans la coque d'un bateau est suffisant pour laisser l'eau l'envahir et le faire couler.
Certains pensent qu'il est normal de mentir parce que “tout le monde le fait”.
Ce n'est pas parce que tout le monde a tort qu'il faut croire qu'ils ont raison.
Là est typiquement le problème de la norme, qui ne signifie pas ce qui est convenable, mais : ce que tout le monde fait. À certaines époques, il était parfaitement normal de posséder des esclaves qu'on maltraitait.
On s'habitue parfois tellement au mensonge qu'on n'a même plus conscience de ses conséquences :
- se couvrir à l'aide de nouveaux mensonges
- se justifier continuellement
- perdre la confiance des autres
- acquérir une mauvaise réputation
- etc.
Et le karma ?
Aussi, à l'instar de tout autre acte nuisible, après un mensonge, un jour ou l'autre, on devrait inévitablement subir un désagrément équivalent. Et malheureusement, il ne suffit pas de ne pas y croire pour s'affranchir de cette loi naturelle. Faire aux autres serait donc se préparer à recevoir la même chose.
Le pire résultat du mensonge
Selon moi, le pire de tous ces inconvénients – pire que le retour karmique – est immédiat et constant. Le problème est qu'on ne le voit pas, mais les autres le sentent (en particulier ceux qui sont propres) : un état de saleté intérieure.
On dégage alors une énergie négative qui dit « Méfiez-vous ! », même quand on décide d'avoir de bonnes intentions. C'est l'expression de la saleté intérieure.
En outre, on ne peut plus accorder sa confiance à quiconque. Projetant notre saleté sur tout le monde, nous ne distinguons pas ceux qui sont propres.
Rien n'est plus laid que la saleté intérieure. À l'inverse, rien n'est plus beau que la propreté intérieure.
Histoire sur l'honnêteté
Un prêtre était tellement saint qu'il ne pensait jamais de mal de personne. Une fois où la communauté marquait un jour de jeûne et d'abstinence, il vit à sa grande surprise un jeune membre de la paroisse en train de dévorer un steak à la terrasse d'un restaurant.
- J'espère ne pas vous avoir scandalisé, mon Père, dit le jeune avec un grand sourire.
- Oh, je suppose que vous aviez oublié que c'est aujourd'hui jour de jeûne et d'abstinence ?
- Non, non, je m'en suis souvenu.
- Alors, vous êtes malade et votre médecin vous a dit de manger pour prendre des forces ?
- Pas du tout. Je me porte comme un charme !
Le prêtre leva les yeux au ciel et dit :
- Quel exemple nous donne cette nouvelle génération, Seigneur ! Voyez comment ce jeune homme admet ses fautes plutôt que de mentir ?
En plus d'être nuisible, le mensonge nous ferme les portes à des avantages infiniment plus grands que les gains minables que nous picorons à travers son usage. Tout individu intéressé par l'accomplissement spirituel se doit de savoir que l'honnêteté est la première porte d'entrée du monde de la sagesse.
Mais des fois, on n'a pas le choix !
Obligé de mentir ?
On a toujours le choix
Quand on est pris dans un tourbillon de mensonges, ce peut-être effectivement très difficile de s'en sortir. Néanmoins, au début, avant que le premier souffle ne devienne tourbillon, on a toujours le choix !
Qui sème le vent récolte la tempête.
Un mensonge peut en cacher d'autres
L'un des vices du mensonge, c'est de le croire seul, alors que souvent, il en entraîne avec lui tout un bataillon, selon un effet boule de neige.
- Pourquoi t'es pas venu travailler, aujourd'hui ?
- J'étais trop malade.
- Ah bon ? Alors qu'est-ce que tu faisais en ville, cet après-midi ?
- J'ai dû aller m'acheter des médocs.
- Pourtant je t'ai vu entrer dans la salle de jeux.
- Ah ouais, mais ça, c'était parce que… Heu…
Pour qui a déclenché une cascade de tempêtes, le meilleur moyen de s'en sortir, c'est simplement d'avouer sa faute. Le ciel s'éclaircit d'un coup, et généralement, c'est bien apprécié. Certes, la colère d'apprendre le mensonge tend souvent à prendre le dessus, mais “qui paye ses dettes s'enrichit”, n'est-ce pas ?
Les prétextes
À l'inverse des convictions de beaucoup de gens, il n'existe pas de bonne raison de mentir. Toutefois, il serait certainement aussi naturel que pardonnable d'avoir recours au mensonge si c'est le seul moyen de sauver une vie ou une chose importante, comme une maison (qui abrite une famille, par exemple). Mais honnêtement, avez-vous souvent fait face à une telle situation ?
Des exemples de prétextes types de mensonges seront expliqués plus bas (dans le chapitre “Toujours la vérité !”)
Le mensonge forcé
Nous pensons des fois qu'il est difficile de se forcer à ne pas mentir. Ce peut-être pire encore, lorsque ce sont les autres qui nous forcent au mensonge.
Ne l'entendez-vous pas quasi quotidiennement, celle-ci ?
- Si jamais, t'auras qu'à dire que tu savais pas !
Dans le feu de l'action, nous pouvons ainsi nous retrouver – plus ou moins violemment – incités, dans une atmosphère de chantage, surtout dans le cadre d'un mensonge collectif. Pour rester propre, il importe donc de savoir faire preuve d'une redoutable auto-discipline.
Le mensonge par omission
Il s'agit de dissimuler une information dans le but de tromper. D'aucuns croient que le fait de ne pas vouloir répondre à une question est un mensonge par omission. Si vous ne répondez pas à un inconnu qui vous demande votre numéro de téléphone ou le code de votre carte bancaire, vous n'êtes pas un(e) menteur(euse) !
Le silence (taire une information) est un mensonge par omission seulement dès lors que nous savons qu'il peut induire une considération incorrecte.
Le mensonge par omission selon Cicéron
Cicéron donne l'exemple du bateau chargé de céréales qui arrive dans une ville où il y a famine. Le capitaine sait que d'autres navires le suivent en grand nombre. Cicéron déclare moralement inacceptable de cacher cette information aux habitants, dans le but, par exemple, de vendre ses céréales plus cher en laissant perdurer la crainte de pénurie.Le mensonge par omission est une pratique prisée des manipulateurs (souvent dans la politique et les médias). Ceux qui s'y adonnent parviennent parfois à gagner gros. Ce qu'ils ignorent, c'est qu'ils finiront par perdre plus qu'ils ne gagnent. Toute dette finit inévitablement par être remboursée un jour l'autre.
Même si les mensonges de l'un d'eux restent inconnus, ces actes sont chargés d'énergies nuisibles qui créent un malaise constant (en dépit des apparences). Aussi, toute cette négativité rend son esprit si encrassé que son mental ne pourra faire autrement, dès que les occasions se présenteront, de tomber dans un engrenage de situations où il subira ce qu'il avait lui-même fait subir.
L'acte lui-même contient la graine de la conséquence. Le karma n'a rien de si “magique”, bien qu'il emprunte souvent des chemins bien trop complexes à appréhender.
Le marketing
Est-il vraiment nécessaire d'aborder la question du mensonge dans le domaine de la vente et de la publicité ? Pour les passionnés, il me semble que de nombreux sites en parlent déjà fort bien.
Je me contenterai de mentionner un exemple curieux, à propos de Confucius – très à cheval sur le mensonge –, qu'il ne cessait de réprouver. Il estimait toutefois qu'on devait le tolérer pour les marchands, sans quoi ceux-là ne pourraient pas gagner leur vie.
La plaisanterie
Il convient de différencier la blague de la farce.
La blague
La blague, si elle ne se destine qu'à faire rire ceux qui l'entendent et qu'elle ne comporte aucune méchanceté à l'égard de quelle catégorie de personnes que se soit, alors elle peut être bonne à dire.
– On a beaucoup écrit sur mon fils.
– Ah, il est connu ?
– Non, il est tatoué.
La farce
La farce, si elle comporte un mensonge – même de très courte durée –, sera plutôt à éviter, surtout si elle n'amuse pas la victime. En principe, une farce engendre une émotion négative.
– Je suis désolé… ton mail où tu me dis tout ce que tu penses de la patronne, il lui a été transféré par erreur…
– Quoi ?? Mais alors… Ma carrière est fichue ! Il faut que je l'appelle sur le champ… Mais je ne sais même pas quoi lui dire…
– Ah ah ah, tu m'as cru ! Ben quoi, ça te fait pas rire ?
Même si la chute apporte immédiatement le soulagement, le choc qui l'a précédé peut être intense. Croyant plaisanter gaiement, le farceur peut ainsi générer beaucoup de négativité, donc des dettes significatives.
« Regardez, frère Thomas, il y a un bœuf qui vole ! »
dirent à Thomas d'Aquin deux novices, ravis de le voir aller à la fenêtre pour observer un fait si peu habituel.
L'intéressé se contenta d'affirmer :
« J'eus été moins surpris de voir un bœuf voler qu'un religieux mentir ».
La protection des gens honnêtes
Si vous êtes quelqu'un d'honnête, vous devez avoir cette protection, une crainte de mal faire (prenant parfois la forme de honte), qui se traduit par une sensation désagréable (assez similaire à la peur), comme quand vous vous apprêtez à faire quelque chose de pas très correct.
Si, quand vous vous apprêtez à dire ou faire quelque chose, vous sentez votre cœur en proie à une tension liée à votre intention, considérez cela comme un “panneau sens interdit”.
Le faux mensonge
Si (comme on le fait souvent sur le ton de la plaisanterie) vous émettez une affirmation clairement fausse, donc il est évident que ceux qui vous écoutent se doutent bien qu'elle est fausse, commettez-vous un mensonge ?
« Je mange un éléphant tous les matins au petit-déj' ! »
Votre interlocuteur n'imaginera certainement pas que chaque matin, vous découpez un pachyderme en morceaux, que vous mettez le tout dans une gigantesque marmite pour le cuire et le dévorer intégralement, puis que, pour le coup, vous devez disposer d'une sacrée réserve d'ivoire ! Si vous pensez que, parmi ceux qui vous écoutent, personne n'est suffisamment naïf pour le croire (comme un enfant), il n'y a pas de mensonge.
Une connaissance précise des différents types de mensonge n'apporte aucune vertu. C'est comme la discipline monastique : certains moines la connaissent par cœur, ce qui ne les empêche pas d'adopter une conduite fort peu vertueuse. Cette connaissance théorique de la vertu peut même les aider à contourner des interdit. Au mieux, ils suivent des règles aveuglément, sans connaître leur état d'esprit.
Moine ou pas, le seul moyen d'améliorer notre vertu est de sonder régulièrement notre état d'esprit. Avant une parole ou une action, nous restons vigilants à notre réelle intention.
L'antidote au mensonge n'est donc ni l'étude, ni la réflexion. C'est la vigilance consciente. Quand on voit ce qui est salissant, on ne veut plus salir.
Autres types de mensonges
Les promesses
Faire des promesses est le signe évident d'un manque de sagesse. Nul n'est jamais en mesure de prédire avec certitude ce qu'il va se produire dans le futur. De ce fait, même avec la meilleure volonté du monde, nous ne sommes jamais sûrs de pouvoir honorer une promesse. Si les événements nous forcent à manquer à une promesse, nous nous retrouvons dans une position semblable à celle d'un menteur. La promesse est comme un mensonge fait en avance.
Nous pouvons aussi remarquer qu'en général, ceux qui font le plus de promesses, ce sont ceux qui en brisent proportionnellement le plus (quand bien même les événements étaient favorables pour les tenir).
Dans tous les cas il est donc mieux de ne rien promettre, et de faire ce qu'on peut. Si on peut, la surprise sera bonne ; si on ne peut pas, il n'y aura ni déshonneur, ni déception.
L'exagération
S'il s'agit d'une façon de parler comprise par tous, ce n'est pas un mensonge. Exemples :
- Je suis congelé.
- Tu vas te faire tuer par ton père.
- Dans cette école je n'ai rien appris.
Vous l'avez compris, l'exagération est un mensonge seulement lorsqu'elle est prise pour argent comptant.
La vantardise
La vantardise pousse à l'exagération, à la déformation, à montrer ce qui n'est pas, donc au mensonge. Même une vantardise non verbale est une tromperie.
La fausse humilité
C'est le même problème que la vantardise, à la seule différence que le processus est inversé. L'humilité n'est qu'une forme d'orgueil, dès lors qu'il s'agit d'un sentiment conscient :
- Moi, je suis humble !
Si l'on cherche à montrer qu'on est humble, c'est bien la preuve que c'est faux !
Le mensonge par l'action
Contentons-nous d'un petit exemple explicatif :
Faire semblant de boiter pour échapper à une corvée.
Le mensonge par les apparences
Les manières de mentir par les apparences sont aussi variées que les manières de se mettre en valeur physiquement : les vêtements, le maquillage, les expressions du visage, la façon de marcher, les comportements, etc.
Il va sans dire que, pour le déguisement, ne mentent que ceux qui l'emploient dans le but de tromper. Si vous vous déguisez en Cléopâtre, il est peu probable qu'on aille penser qu'il s'agisse de la vraie. Par contre avec un simple habit, une cravate ou ne serait-ce qu'un badge, on peut mentir. C'est le cas dès que nous arborons un vêtement ou un accessoire dans le but que d'autres pensent que nous appartenons à une catégorie (classe sociale, profession, entreprise, club…) à laquelle nous sommes étrangers.
Si les escrocs présentaient des têtes d'escrocs, ils ne pourraient pas faire ce métier.
Exemple classique de mensonge par l'apparence : être sensible et pacifique, mais revêtir un aspect qui évoque le danger.
Ingrédient à proscrire : une carapace de “dur(e) à cuire”. Elle n'effraiera que des inoffensifs et au contraire attirera des individus violents.
Ce qui attise ou adoucit la violence, c'est essentiellement la qualité de l'esprit.
Préparation de la sécurité : pour concocter la plus efficace des recettes de la sécurité, déversez toute la bienveillance et la gratitude dont vous disposez, et versez-les dans un esprit que vous aurez pris soin de nettoyer de tous préjugés. Délicatement, répandez leur parfum tout autour de vous. Laissez continuellement croître à feu doux.
Pour la réussite de cette préparation, il importe de faire goûter les qualités d'esprit obtenues à chaque personne rencontrée, considérant chacune d'elles comme votre meilleur(e) ami(e).
Vous jouirez alors d'une protection dont vous constaterez une réelle supériorité comparée à la plus épaisse des armures.
Vous comprendrez que seul, l'attachement à des pensées négatives nous font nous sentir vulnérables. Et que seule la négativité en nous attire les négativités extérieures.
Aussi, nous sommes nombreux à croire – à tort naturellement – que les mensonges nous permettent de nous protéger. C'est pourquoi nous les cultivons tant et que nous les trouvons autant normaux qu'indispensables, alors qu'ils n'ont d'autres effets que d'amplifier la misère intérieure.
Les hommes portent un épais manteau de mensonges pour se couvrir comme s'il faisait mauvais temps.
La fausse vérité
À l'instar du faux mensonge, il n'y a pas de mensonge à affirmer une fausse vérité, c'est-à-dire une fausse information en croyant sincèrement qu'elle est vraie.
Par contre, un mensonge salit l'esprit dès lors qu'il est énoncé, même si personne ne le croit, car l'intention est de mise.
Les jeux
Dans un jeu où il est admis par tous les joueurs de faire de fausses déclarations, celles-ci ne seront alors que de faux mensonges. Parce que tout le monde est averti, s'attend et accepte d'être trompé à tout moment.
Et dans une partie d'échecs, bien évidemment, vous ne commettez pas de mensonge par omission, lorsque vous vous vous abstenez d'indiquer à votre adversaire que, s'il ne déplace pas son fou, vous êtes sur le point de prendre sa dame.
Les images
N'avez-vous jamais eu la pensée suivante, en visitant une région éloignée ?
- Je suis un peu déçu, sur les photos du bouquin ça avait l'air quand même plus beau, plus authentique…
La tâche d'un photographe n'est pas de montrer simplement les choses telles qu'elles sont. il cherche au contraire à mettre en relief les aspects esthétiques de façon aussi attrayante que possible. La photographie ment, mais le photographe n'est pas un menteur pour autant, car il cherche à plaire (ou à susciter certaines émotions), non à tromper.
Autres
Bien sûr, il existe encore d'autres sortes de mensonges, mais disons que cette page est déjà bien assez longue…
L'un des mensonges les plus fructueux, les plus intéressants qui soient, et l'un des plus faciles en outre, est celui qui consiste à faire croire à quelqu'un qui vous ment qu'on le croit.
La politesse
Dans toutes les cultures, les codes de politesse sont faits de dires et de comportements qui peuvent façonner, selon la situation ou l'état d'esprit, de fréquents mensonges.
Ces paroles et actes de savoir-vivre, qui se destinent principalement à adoucir les choses et à se montrer plaisants dans nos relations sociales, sont parfois enclines à l'hypocrisie. De toute évidence, c'est là plus une affaire d'état d'esprit que des codes eux-mêmes.
Je ne doute pas qu'il soit possible, tout en se vouant à une parfaite sincérité, de briller de courtoisie et de bienveillance aussi pleines que l'exhorte la politesse. Car après tout, la politesse s'accomplit surtout dans le respect envers les autres. Et comment pourrait s'éveiller le respect si l'hypocrisie est de mise ?
En découvrant le nouveau-né d'une amie, un visage déformé qui vous évoque un film d'épouvante, ne vous sentez pas obligé(e) de vous exclamer :
- Oh, quel magnifique bébé !
C'est certain, vous trouverez bien d'autres choses à la fois sincères et aimables à dire qui ravira votre amie.
La rareté de l'or a fait inventer la dorure ; ainsi l'on remplace la bonté par la politesse, qui en a les apparences ; la vertu par l'honneur, qui en a l'éclat.
Et d'où vient donc ce mot ?
L'art de se passer des vertus qu'elle imite.
On a coutume de croire que sans la politesse, la vie en communauté est impossible. Le croyez-vous ?
Cependant, l'esprit honnête et vertueux peut vivre en harmonie avec son entourage sans avoir à user de la politesse conventionnelle.
Un autre des avantages de l'esprit honnête et vertueux est de distinguer aisément les personnes à qui il peut – ou pas – accorder sa confiance.
au Ve s. av. J.-C. :
Jamais les mensonges du fourbe ne trouvent crédit auprès de l'homme vertueux.
Si vous me permettez un dernier conseil sur la politesse… Lorsque vous accueillez, aidez, saluez, répondez à quelqu'un, ne dites ni ne faites rien dans l'idée que c'est exigé par la politesse. Dites-le et faites-le avec le cœur, c'est-à-dire avec joie, dans le plaisir de faire plaisir, avec la satisfaction de saisir une opportunité de récolter les délicieux fruits de la présence et de la bienveillance.
Et politesse ou non, rappelez-vous qu'on ne pourra jamais user d'une raison légitime de vous blâmer lorsque vous vous abstenez de mentir.
Parfois, il y a quand même des cas où c'est mieux de mentir !
Toujours la vérité !
Si on exclut le cas exceptionnel du danger de mort, il n'existe rien qui puisse excuser le mensonge. Même si la vérité peut parfois faire mal sur le moment, elle finit toujours par triompher, ne serait-ce qu'en contribuant à façonner un esprit juste.
Il n'y a aucun exemple que la vérité ait été nuisible ni pour le présent ni pour l'avenir.
Nul ne peut prévoir les pièges que cachent les mensonges et les bienfaits dont recèlent les vérités.
Vous êtes en ville avec un ami pour faire les magasins. Il essaye une paire de baskets, et vous demande comment vous les trouvez. Pour vous, elles sont tout bonnement horribles. Pour lui faire plaisir, vous prétendez qu'elles sont très bien. Il les achète, et plus tard, il réclame votre franchise et vous finissez par lui avouer votre vrai sentiment. Il est très fâché, car il ne les apprécie guère non plus, et par-dessus le marché, elles ont coûté cher. S'il a procédé à l'achat, c'est parce qu'il s'était basé sur votre avis, croyant que vous saviez ce qu'il lui fallait.
Et si t'as un gosse de 6 ans qui te montre ses premiers dessins et qu'ils sont affreux, là non plus tu ne mentirais pas ?
À un enfant qui me montre un dessin qu'il a bâclé, si je dis
- Oh, qu'il est beau, ton dessin !
je gagnerais sans doute un joli sourire, et le petit continuera à gribouiller gaiement son cahier à dessins jusqu'à la dernière page. Seulement, voilà ce qui risque de se produire par la suite…
- un choc, quand toute sa classe se moquera de lui lorsqu'il exhibera fièrement son “œuvre”
- une grande déception quant à ses “talents”
- une perte de confiance envers moi
À moins qu'il pense que je sois le seul au monde à avoir raison, ce qui ne ferait que préparer une bombe à retardement.
Un enfant a besoin d'encouragements, c'est indéniable, mais je pense que non seulement il préfère la franchise – à l'instar de n'importe qui –, mais il en a aussi besoin, pour se construire dans la stabilité.
Alors intéressons-nous à lui de près (c'est ce qu'il veut), et encourageons-le tout en restant honnête.
- C'est dur à faire ce que tu as choisi de dessiner, je te félicite pour tes efforts !
Vous pouvez même lui expliquer quelques bases. Enthousiasmé, il s'attellera à des dessins plus précis. Quand il en montrera un à sa maîtresse, elle ne résistera pas à vouloir l'afficher sur le mur de la classe.
Si la vérité est amère, ses fruits sont doux.
Le mental
Si vous ne mentez plus du tout, c'est déjà merveilleux, miraculeux, presque. Toutefois, l'honnêteté complète peut être encore bien plus subtile qu'on le croit.
Le plus fourbe, le plus indétectable – et pourtant constant – des menteurs est celui qui enveloppe notre esprit : le mental.
Le mental est ce qui génère les pensées et les émotions. Ces dernières sont ce qui nous empêche de voir la réalité telle qu'elle est.
Nous croyons dur comme diamant tout ce qu'il nous montre et raconte. Comme nous y croyons au même titre que nous croyons ce que nous montrent nos yeux. Rassurez-vous, ce type de “mensonges” n'entravent toutefois pas votre honnêteté, car ils sont inconscients. Incapable de différencier le réel de l'irréel, le mental ne fait que juger (bien, mal, alors que la réalité n'est ni bonne ni mauvaise ; elle est).
Besoin d'un exemple de mensonge mental ? Affirmer :
- Monsieur Tartempion a un visage effrayant, mais il sait faire un succulent soufflé au fromage.
Subjective, cette affirmation ne concerne que la perception de celui qui l'a dite. Les petits chiens de Monsieur Tartempion, quant à eux, sont attirés par leur maître qui incarne (pour eux) la sécurité, mais sont répugnés par son soufflé.
Des distractions au monde du travail, presque tout est susceptible de nous entretenir dans les mensonges mentaux. C'est pourquoi les moines de toutes traditions et les sages de tous horizons évitent tout ce qui nourrit le mental : les plaisirs sensuels, la musique, les films, la mode, le maquillage, le bavardage, etc.
Ils préfèrent se consacrer à l'esprit sans souci et sans aveuglement que procure l'instant présent.
Être pleinement dans la réalité, c'est être éveillé. À l'inverse, on dort. On a les yeux ouverts, mais on rêve, on est dans les songes. D'ailleurs, on retrouve l'étymologie du mot songe dans mensonge.