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Des réponses aux questions essen­tielles à propos de la vertu :

Pourquoi la vertu est si fonda­men­tale ? Comment se res­trein­dre ? À quel degré ? Qu'est ce que la distraction ? Quels sont les 4 points de la Parole Juste ? Que signi­fie être irré­pro­chable ?

Suggestion
Lisez lentement. Prenez le temps de digérer. Les pages de ce site sont des concen­tra­tions d'infor­ma­tions utiles.

La vertu

À quoi ça sert ?

Ingrédient de base

Il est rare qu'on la prône, on n'en parle presque pas. Pourtant, la vertu est essen­tielle à notre déve­lop­pe­ment spirituel.

Quelle idée en avez-vous ? Que répon­dez-vous à la ques­tion :

  • À quoi peut bien servir la vertu ?

Pensez-vous qu'il s'agisse d'être bien vu par votre entou­rage, d'accu­muler du mérite, ou encore, d'acqué­rir la con­fiance des autres ?

En réalité, c'est bien plus que cela. La vertu est l'ingré­dient de base indis­pen­sable à la com­pré­hen­sion de l'esprit, au discer­ne­ment, à la liberté inté­rieure. Elle est le préli­mi­naire de la médita­tion. Sans elle, il est tout bonne­ment impos­sible de méditer avec effi­ca­cité. Pour­quoi cela ?

Obstacles à la liberté

Imaginons que vous vous soyez rendu(e) dans un grand parc pour méditer un peu. À peine ins­tallé(e) à l'ombre d'un véné­rable marron­nier, vous réalisez avoir quitté votre appar­te­ment trop préci­pi­tam­ment. À tel point que vous ne savez même plus si vous avez fermé la porte à clé…

Tiraillé(e) par un tel doute, allez-vous réussir à vous délasser com­plè­te­ment pour une bonne médita­tion en toute sérénité ? Par­vien­drez-vous à ne vous préoc­cuper que de l'ins­tant présent, sans res­sen­tir la moindre des tensions ?

Imaginons maintenant que vous vous revoyez parfai­te­ment fermer la porte à clé. Ouf ! Néan­moins, ce que vous avez oublié, c'est d'étein­dre le four. Ce mois-ci, votre facture d'élec­tri­cité sera plus élevée que d'habi­tude. C'est dommage, car votre budget est déjà serré. À part cela, il n'y a aucun danger, vous pouvez fermer les yeux et respirer calme­ment. Le pro­chain bus pour rentrer n'est que dans une heure. Pendant ce temps, autant profiter de la tran­quil­lité du parc.

Cependant, sachant que le compteur est en train de tourner pour rien, serez-vous capable d'igno­rer cette pensée et de tout relâ­cher en vous ? Pourriez-vous vous sentir tota­le­ment en paix ?

De façon similaire, l'immo­ra­lité engendre une gêne de l'esprit. Ce malaise est un obs­tacle à la tran­quil­lité inté­rieure, et par consé­quent à la compré­hen­sion profonde.

Mettez-vous dans la peau d'un voleur. Aujour­d'hui, vous avez dérobé divers articles dans quel­ques maga­sins. Ayant enten­du parler des bien­faits de la médi­ta­tion, vous éprouvez l'envie d'essayer. Vous vous asseyez, fermez les yeux et respirez calme­ment, ce qui vous apaise. Mais rapi­de­ment, un nuage de néga­ti­vité remonte à la surface. Sachant que votre mode de vie est malsain, votre esprit ne peut connaî­tre la quié­tude. Soit vous éprou­vez de la honte, soit votre mental trouve toutes les raisons pour justi­fier vos actes. Quand une mouche vient taper contre la vitre, vous sur­sautez. Quand vous enten­dez des pas dans les esca­liers, vous tres­sail­lez. Quand on frappe à votre porte, vous bon­dis­sez et vous concluez :

  • La méditation, c'est vachement trop dur, c'est pas fait pour moi !
Proverbe français
Bien mal acquis ne profite jamais.

À l'identique, un individu qui baigne dans le mensonge, qui se soumet à l'alcool, ou qui s'inves­tit copieu­se­ment dans les plaisirs senso­riels, pour ne citer que ces quel­ques exemples, verra son esprit bien trop pollué pour espérer un quel­conque succès dans son déve­lop­pe­ment spiri­tuel.

Les actes nuisibles engendrent inévi­table­ment des états d'esprit négatifs, tels que :

  • Confusion
  • Craintes
  • Angoisses
  • Doutes
  • Regrets
  • Frustrations

Bien que cela puisse être plus subtil à appré­hen­der, même les actes néfastes minimes suffi­sent à entra­ver le proces­sus qui conduit à la Déli­vrance. Pour avoir une idée de l'étendue du problème, il suffit de se pencher vers l'expé­rience des médi­tants. La plupart d'entre eux, bien que très ver­tueux dans l'ensemble, sont soumis à rude épreuve par toute une armée d'obs­tacles. Ces barrages de l'esprit sont dus à des micro-états d'esprit néga­tifs dont il ne sont même pas cons­cients. Seules de pro­fondes prises de cons­cience en viendront à bout, grâce à la patience, la persé­vé­rance et la vigilance.

Pour les obstacles les plus grossiers, le pro­blème est beau­coup plus simple. Prendre soin de sa vertu suffit à les pulvé­riser !

Une absence de choses

Il convient de comprendre que la vertu n'est pas une chose, mais une absence de choses. “Développer la vertu” n'est donc qu'une façon de parler. De la même manière, lorsque nous parlons de “gagner de l'espace vide” dans sa maison, cela ne signi­fie pas que nous sommes allés au marché acheter quelques mètres cubes d'espace vide pour les instal­ler chez soi. Pour par­venir à ce résultat, nous avons retiré des bibelots gênants et du mobilier inutile.

À l'identique, pour “gagner de la vertu”, nous allons retirer des compor­te­ments gênants et des volitions nuisibles. La mora­lité consiste donc à faire du vide dans sa tête, à y retirer ce qui gêne. Quelles que soient les qualités que vous souhai­tez déve­lopper, il n'y a qu'en étant vide, libre, spa­cieux(se), vacant(e), dispo­nible, que vous y par­vien­drez efficace­ment.

Pour l'accomplissement intérieur, nous n'avons besoin de rien du tout ! Tout ce que nous avons à faire, c'est de nous défaire de ce qui obstrue. Et pour nettoyer les obs­truc­tions, nous n'avons pas besoin de déter­gent. Nous évitons simple­ment les saletés d'appa­raî­tre en nous entraî­nant à contrô­ler notre esprit. Nous nous abste­nons, autant que faire se peut, de tout état d'esprit désa­vantageux.

Adage suisse
Le secret d'un pays propre n'est pas de bien le nettoyer, c'est de ne pas le salir.

 

Une affaire de lâcher-prise

Vous l'aurez sans doute compris, la vertu est avant tout une affaire de lâcher-prise, de détache­ment. Cela signi­fie aussi que si vous êtes bien détaché(e), votre vertu ne pourra plus être bien sale. En effet, les manque­ments à la vertu concer­nent les actes provo­qués par un atta­che­ment exces­sif, voire incon­trôlable :

  • Abattage d'un animal
  • Abus sexuel
  • Vol
  • Consomma­tion d'alcool
  • Mensonge
  • etc.
Attention :
Un attachement peut prendre la forme d'un désir, mais aussi celle de l'inac­cepta­tion d'une situa­tion, ce qui peut conduire à la violence.

Comment reconnaît-on le vertueux ? Il s'abstient d'inten­tions nuisi­bles, de paroles nuisi­bles et de com­por­te­ments nuisibles. Ici, nuisible se réfère autant à soi-même qu'envers les autres. La vertu sert donc à réduire les poisons du mental.

Comment s'améliorer ?

Le bon moyen d'amé­liorer notre vertu est de sonder régu­lière­ment notre état d'esprit. Avant une parole ou une action, nous restons vigi­­lants à notre réelle inten­tion. C'est un entraî­ne­ment constant et quo­ti­dien, qui à l'instar de l'appren­tis­sage d'une langue, finit par devenir naturel.

L'antidote à la méconduite n'est ni l'étude, ni la réflexion. C'est la vigi­lance cons­ciente. Quand on voit le salis­sant, on ne veut plus se salir.

Le piège à éviter est celui de se comparer aux autres. Un menteur qui boit un verre de vin par jour peut se prendre pour un saint, s'il vit entou­ré de voleurs ivrognes. De plus, il est impos­sible d'échapper à l'influence de son envi­ronne­ment, d'où l'impor­tance, comme Bouddha le pré­co­nisait, de préférer la fré­quen­ta­tion avec des indi­vidus plutôt sages que sots. Si vous ne pouvez vous empêcher de vous comparer, alors faites-le avec la per­fection.

Proverbe français
Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois.

 

Ce qu'un être sans vertu…

Pourrait être ? [Réponse]
Rêverait d'être ?[Réponse]
Est en réalité ?[Réponse]

La restreinte

La restreinte des sens

Selon Bouddha, le manque de restreinte des sens alimente la mau­vaise conduite, qui ali­mente les entra­ves à la médi­ta­tion, qui ali­men­tent l'igno­rance.

ignorance
Absence de sagesse, de compréhension, de lucidité. Racine de toutes les croy­ances erronées.

La restreinte concerne tout ce qui suscite de l'atta­che­ment, par les 6 sens. On parle donc de :

  1. restreinte du corps
  2. restreinte de la vue
  3. restreinte de l'ouïe
  4. restreinte du goût
  5. restreinte de l'odorat
  6. restreinte du mental

Pour le mental, il s'agit du plaisir de l'intel­lec­tu­alisa­tion, de certaines idées. Néan­moins, penser à votre glace pré­férée au cara­mel et choco­lat relève de la restreinte du goût.

Quelles sont les premières choses dont il convien­drait de se res­treindre ? De tout ce qui peut produire du désir. Prin­ci­pale­ment :

  • sexe
  • nourriture
  • sommeil
  • confort
  • distraction

Vous pouvez travailler sur ce qui vous est le plus facile à abandonner, mais il importe de tra­vailler en même temps sur les points les plus tenaces. Ces derniers se cons­tituent de plu­sieurs couches dont les pre­mières sont plus faciles à nettoyer. Par exemple, vous gardez vos trois repas par jour, vous gardez même la glace au cho­colat, mais substi­tuez à la viande des pois, remplacez les boissons gazeuses sucrées par du thé vert, évitez de gri­gno­ter entre les repas, réduisez ce qui est trop sucré ou trop trans­formé… Ce qui favorise la restreinte est le fait de savoir que géné­rale­ment, les aliments mauvais pour la vertu le sont aussi pour la santé.

Si abstention signifie renonce­ment, res­treinte signifie réduction. Bien entendu, il convient de modifier ses habi­tudes désa­van­ta­geuses de façon pro­gres­sive. Seul, un renon­çant avancé sera capable de réduire ses besoins vitaux au strict minimum et de renoncer complète­ment à ce qui n'est pas indis­pen­sable.

Nul ne peut plus l'ignorer, les problèmes écolo­gi­ques tendent à faire s'interroger sur la surconsomma­tion. Par contre, vue sous l'angle du déve­lop­pe­ment spiri­tuel, la restreinte est loin de cons­tituer un sujet popu­laire. Pourtant, elle est le pilier central de tout accom­plis­se­ment inté­rieur. Cons­tatez à quel point “restreinte” est presque syno­nyme des prin­ci­pales qualités sources de la sagesse :

  • détache­ment
  • contente­ment
  • renonce­ment
  • humilité
  • lacher-prise
  • vertu

Se restreindre ne signifie pas se forcer, ni s'imposer, ni s'inter­dire. Il s'agit plutôt d'évi­ter un accrois­se­ment inces­sant de con­forts, de plai­sirs et de dis­trac­tions. Ce laisser-aller conduit inévi­ta­ble­ment à une dépen­dance nui­sible. Ainsi, préfé­rons culti­ver l'habi­tude de nous con­ten­ter de ce qui est natu­rel est néces­saire.

La restreinte implique aussi calme et vigilance. Autant pour les res­sources plané­taires que pour notre pratique de paix inté­rieure, elle méri­terait bien de figurer parmi nos pre­mières préoc­cupa­tions, qui oserait le dénier ? Or, nous consacrons toutes nos énergies à nous investir corps et âmes dans une boulimie de plaisirs et de dis­tractions.

Kassinou le détracteur

Sans aucune distraction, la vie doit être triste à mourir !

La distraction

C'est exacte­ment l'inverse : ceux qui n'ont plus besoin de distrac­tion sont – de loin – les plus heureux. Le besoin de dis­trac­tion est une maladie ima­ginaire, car l'esprit –tout comme le cerveau – est bien plus satis­fait dans le calme, le silence, le rien. Ce sont d'ailleurs les seules condi­tions qui per­met­tent le bonheur authen­tique, l'extase, la béatitude.

Si, comme à peu près tout le monde, vous avez l'habi­tude de vous dis­traire en perma­nence, vous retrouver soudai­ne­ment privé(e) de toute distraction vous ferait éprouver un manque consi­dé­rable. Ce ne serait pas à cause de l'absence de distrac­tion, mais à cause de l'effet drogue.

distraction
Quelque chose qui divertit, amuse, excite, attire l'esprit.

À l'origine, distraction signifie perte de l'attention. « Inapplica­tion de la pensée aux choses dont on devrait s’occuper », peut-on lire sur Wikipedia.

L'étymologie latine exprime la discorde, la désunion.

Si nous sommes autant enclins à la distraction, c'est avant tout parce que nous ne parvenons pas à nous accepter tels que nous sommes. Nous craignons de voir ce qui est, de côtoyer notre état naturel, comme un enfant qui préfère des aliments arti­fi­ciels bardés d'arômes chimi­ques que des fruits frais. Alors, nous nous distrayons, comme certains boivent ou se piquent.

Expérience personnelle

Jeune moine, en proie à une montagne de petits attache­ments, j'étais con­vaincu qu'ils ne m'empê­che­raient tou­te­fois pas de bien méditer. Je son­geais même qu'il était bien de garder quelques-uns de ces petits désirs. Repenser aujour­d'hui à un tel aveu­gle­ment me fait bien sourire.

En réalité, aussi subtils et inconscients soient-ils, les atta­che­ments freinent et bloquent le pro­cessus d'éveil. Je n'ai plus de doute là-dessus : l'absence de dis­tractions est un pur bonheur, une déli­vrance en soi.

Bouddha l'a bien dit : Les divertisse­ments et les jeux cons­ti­tuent une diffi­culté dans la réa­li­sa­tion de la mora­lité. Plus l'esprit est nettoyé des désirs, jusqu'aux plus petits, plus il est possible de péné­trer dans les merveil­leuses profon­deurs de la médita­tion. Il y a un para­doxe : plus nous aban­donnons ce qui nous passionne, plus la vie devient passion­nante.

Plus de restreinte
pour plus de paix

Si, selon son propre rythme, tout le monde s'adonnait à ne serait-ce qu'un peu de restreinte, il n'y aurait plus d'inéga­lités, plus de guerres, plus de destruction éco­lo­gique et plus de pro­duits chimi­ques dans la nourri­ture.

Bien sûr, c'est utopique. C'est juste pour donner une idée de la puis­sance du bien­fait de la res­treinte.

Lâcher-prise en douceur

La distraction est un moyen d'oublier ses diffi­cultés. Le vice, c'est que lorsque nous voulons nous dis­traire plus, cela génère de nou­velles diffi­cultés. À l'inverse, quand nous renon­çons, nous renon­çons aussi aux diffi­cultés ; nous n'avons donc plus besoin de trouver une fuite.

Pour lâcher-prise sur les mau­vaises habi­tudes, il n'y a besoin d'aucun forçage, seule­ment de la compré­hen­sion et un peu de déter­mina­tion. Si nous forçons, nous récol­tons de la frus­tra­tion.

Pour être propre, nous n'allons pas nous parfumer pour masquer la crasse. Pareil­le­ment, le travail spiri­tuel consiste avant tout à nettoyer ce qui est sale. Pour se faire, il convient d'abord de déceler, puis d'admettre ce qui est sale, malsain, incon­venant. C'est pourquoi l'accep­ta­tion et la vigilance sont des clés dans le déve­loppe­ment de la vertu, de la médi­ta­tion, et enfin, de la sagesse.

La vertu des renonçants

Désinvestisse­ment

Savez-vous ce qui caractérise le plus un moine ? Le désin­ves­tisse­ment. Un renonçant passe sa vie à se désin­vestir de tout. Il se contente de solitude, d'isole­ment et de silence. Son esprit est si libre qu'il ne veut cer­tai­ne­ment pas l'encombrer.

Ce qui rend difficile l'accès à cette magni­fique simpli­cité, c'est l'habitude de l'esprit à s'investir sans cesse dans des acti­vités, des plus mentales aux plus sociales, en passant par la palette infinie des distrac­tions. Quand on est renonçant, la seule chose dans laquelle on se retrouve plei­ne­ment investi, c'est le désinvestisse­ment !

Or, beaucoup de moines ne suivent pas les recom­man­da­tions de Bouddha. Ils se dégui­sent en moine, rien de plus. Faites plutôt l'inverse : tout ce que recom­mande Boud­dha, sans vous déguiser en moine.

Discipline monastique

Même s'il doit être observé, le Vinaya n'est qu'un outil. Sans rien en connaître, celui qui reste par­fai­te­ment honnête, respec­tueux et paci­fique a de fait une vertu impec­cable. Par contre, suivre la disci­pline monas­tique à la lettre n'empê­che­ront pas les saletés de l'esprit. Sans briser de règles, certains moines par­viennent à des fins peu hono­rables.

Adage birman
Qui connaît bien le Vinaya peut tuer un poulet.

De plus en plus, hélas, les moines accordent de l'importance à leur apparence, au point d'en négliger com­plète­ment le reste. Vous les verrez toujours dans une belle robe, le crâne parfaite­ment rasé. Certains s'oignent même de l'huile pour se faire “briller le caillou” ! Cepen­dant, si vous entrez dans leur chambre, vous verrez, par exemple, des mégots partout, une accu­mula­tion et un désordre indescriptibles, des objets qui n'ont rien à faire dans les mains d'un moine…

Pour une intégrité et une discipline digne de leur statut, les moines boud­dhistes de­vraient entrer dans les ordres, à l'ins­tar des moines chré­tiens, seule­ment en cas de réelle vocation.

Bouddha a pourtant mis en garde : porter la robe monas­tique sans vertu, c'est voler la vénéra­tion, et cela, c'est le plus grand des vols.

Comment expliquer le com­por­te­ment catas­tro­phique des moines, actu­elle­ment ? Il faut sim­ple­ment comprendre qu'ils ne sont pas des moines, mais des gens ordi­naires qui portent une robe monas­tique. Leur pratique n'es pas motivée par un souhait de libéra­tion spiri­tuelle, mais par des croyances religieuses où la res­treinte demeure super­ficielle. Lorsqu'on n'est pas investi dans la restreinte, on chavire natu­relle­ment vers son opposé : l'avidité.

La parole juste

Le 4e précepte se confine au mensonge, mais la res­treinte au niveau de la parole, afin de culti­ver ce que les boud­dhistes appellent la parole juste, est de quatre types, donc quatre nuisances sur les­quelles s'entraîner :

  • le mensonge
  • la médisance
  • le langage grossier
  • le bavardage futile

Le mensonge

À lire :
Article consacré au mensonge
Le mensonge

La médisance

Presque un réflexe naturel pour la plupart d'entre nous. Qui ne critique jamais les autres ou leurs œuvres ? Quoiqu'il en soit, il est à la portée de tous de “tourner sept fois” son attention à une inten­tion verbale avant de parler.

Kassinou le détracteur

…Ou avant d'écrire ! C'est que t'y vas quand même pas avec le dos de la cuillère, quand tu cri­tiques les moines !

Je ne le fais pas de bon cœur, et certaine­ment pas par médisance, mais pour prévenir de la véné­ra­tion aveugle. N'importe qui voyant les choses telles qu'elles sont peut le constater : aujourd'hui, le sangha n'est qu'un nid à para­sites. Il s'est trans­formé en service social pour âmes égarées, loin de sa voca­tion d'origine ; celle d'une noble commu­nauté qui incarne et véhicule la voie de la Déli­vrance. Quel obser­va­teur honnête oserait contre­dire ce point de vue ?

Cela dit, je dois admettre que tu n'as pas tant tort. L'idéal est de rester silen­cieux et laisser les autres se rendre compte par eux-mêmes, et de se concen­trer sur ce qui est (ou serait) correct. Encore une ten­dance bien ancrée sur laquelle il me faut tra­vailler.

Concernant les critiques à tendance calom­ni­euses, sachons que cela finit tôt ou tard par nous retom­ber dessus.

Astuce

Pour éviter la médisance ou la calom­nie, parlez comme si la per­sonne visée était présente. Et s'il y a des choses à régler, parlez-en ami­ca­le­ment à la per­sonne concer­née. Un esprit sincère et cour­tois est tou­jours bien­venu.

Kassinou le détracteur

Tu le dirais devant des moines, que ce sont des para­sites ?

Si une occasion se présente, oui ! D'ailleurs, j'ai souvent dit à certains d'entre eux leur compor­te­ment était à l'opposé des recom­manda­tions de Bouddha et qu'ils se pré­pa­raient à des consé­quences kar­miques très dou­lou­reuses. Leur réaction ? Le plus souvent, ils admettent, ricanent, et n'en ont rien à faire. Rare­ment, il rou­gissent un peu, puis s'em­pressent de dévier le sujet.

Le langage grossier

La vulgarité, l'obscénité, les insultes. Par exem­ples : une blague salace, des gros mots.

Beaucoup croient qu'il est impossible de s'abstenir de gros mots en étant sous l'effet de la colère. Cepen­dant, comme par magie, nous y par­venons fort bien lorsque nous sommes en pré­sence d'une personne à qui nous souhai­tons montrer une bonne image de soi. Voilà la preuve que c'est possible. Et n'oublions pas que c'est dans la diffi­culté que le travail de res­treinte est le plus efficace.

Astuce

Imaginez que vous avez un ange protecteur qui tend l'oreille chaque fois que vous êtes sur le point de proférer un vilain mot.

Voilà qui ressemble à un conseil donné à un enfant, mais tant que nous n'avons pas acquis l'indé­pen­dance d'un renonçant, qu'avons-nous de plus qu'un enfant ?

Je dois admettre que lorsque, par exemple, une applica­tion dys­fonc­tionne, il m'arrive de pro­férer une suite de gros mots. Une vilaine habi­tude que je n'ai jamais jugée bien méchante. Il serait temps de nettoyer cela, et conve­nable d'appliquer ses propres conseils… C'est décidé : dès main­tenant, opéra­tion “bouche propre” ! Jusqu'à ce que la belle habitude devienne natu­relle.

Un autre conseil – qui là aussi vaut bien pour moi – est de substi­tuer les mots grossiers par des mots inoffensifs (idéale­ment qui leur ressem­blent). Exemple :

  • Puré ! Je me suis fait berné par cette médio­crité, je vais me faire enguir­lander pour cette étour­derie !

N'allez pas croire que cela soit ringard. Pour sûr, c'est la vulga­rité qui l'est. Ce peut être très amusant de remettre au jour des expres­sions désuètes. L'autre avan­tage est que cela contri­buera à éteindre notre colère.

  • Sapristi ! C'est affligeant d'être floué par de telles canailles. Je suis bien cruche, parbleu !

Le bavardage futil

En plus de gaspiller un temps précieux, le bavardage n'apporte pas de bénéfices concrets. Nourri par le désir de distrac­tion, il est un terrain propice à la médisance et à la cir­cu­la­tion d'informa­tions suscep­tibles de créer des états d'esprits négatifs.

Les conversations convenables

Bouddha a exposé les 10 sujets de con­ver­sa­tion conve­nables pour les moines :

  • le peu de désirs
  • le contente­ment
  • l'isolement
  • la non-association aux autres
  • l'activation de l'énergie
  • la vertu
  • la concentration
  • le discernement
  • la libération
  • la connaissance et vision de la libération

Il est probable que vous ne soyez pas encore moine, nonne ou ascète. Que chacun aille à son rythme ! Juste pour vous donner une idée, les sujets de conver­sa­tion ci-dessus devien­nent si prenants pour les renon­çants, que bien natu­relle­ment, ils ne veulent pas perdre de temps avec le bavar­dage futil.

Bien sûr, il convient d'accorder la même vigi­lance au bavar­dage parlé qu'écrit.

Bouddha a dit :
Pour cultiver calme et vertu, n'abusez pas de Facebook.

(peut-être qu'il n'a pas dit cela, en fait)

La métaphore du bateau

Imaginez un bateau qui possède quelques cabines. Chacune d'elles est confortable­ment équipée : l'air condi­tionné, un réfri­gé­rateur bien rempli, une belle déco­ra­tion, un lit au matelas moelleux, etc. À côté de cela, sa coque est endom­ma­gée, elle a plusieurs trous. Le capi­taine tente de traver­ser la mer, mais aussitôt son navire mis à flot, l'eau entre, et en quelques heures seule­ment, il coule rejoindre le fond des océans.

Qui serait suffisamment incons­cient pour penser qu'un tel bateau vaut mieux qu'un autre qui n'offre que de simples cabines, sans la cli­ma­tisa­tion, sans déco­ra­tion, avec un vieux frigo plein de vide, mais avec une coque en parfait état ?

Vous l'aurez deviné, la coque est la vertu, l'amé­na­ge­ment confortable corres­pond aux posses­sions et aux connais­sances. L'océan, c'est le chemin qui mène à l'accom­plis­se­ment spirituel.

À l'instar du capitaine du premier bateau (celui qui sert maintenant d'habi­ta­tion au corail, oursins et poissons), certains peuvent être poin­tilleux sur des détails insignifiants, et négliger les points les plus impor­tants, tels que le mensonge, la violence (comme l'industrie de la viande), l'alcool ou l'adultère.

Si votre coque reste intacte, et que d'autres criti­quent votre bateau pour son équi­pe­ment rudi­men­taire, n'en tenez pas rigueur. Un jour, ils vous suppli­eront pour que vous leur lanciez une bouée de sauvetage.

Inutile, donc, de mettre la charrue devant les bœufs, préoc­cu­pons-nous toujours en prio­rité des fonde­ments de la vertu.

Métaphore du voilier

Les préceptes de base sont comme la coque d'un voilier. Les pré­ceptes suivants comme les voiles, la quille et le gou­ver­nail. Si un seul manque, il est impos­sible de par­venir à l'île de l'Éveil.

Nombreux sont ceux qui affirment :

  • Un petit mensonge de temps en temps, ça ne fait rien, ce n'est pas grave !

Espérons qu'ils sauront se montrer compré­hensifs si, en pleine mer, le capi­taine du navire leur dit :

  • La coque est percée de quelques petits trous, mais ça ne fait rien, ce n'est pas grave !
Comment reconnaître un moine authentique ?

Il existe 3 points qui constituent un excellent critère. Si, dans son quotidien, un moine les respecte bien, il y a une forte proba­bi­lité d'avoir affaire à un authen­tique renonçant :

• Il n'accepte ni n'utilise d'argent.
• Son regard demeure pai­sible­ment vers le bas (parti­cu­lière­ment dans les lieux animés).
• Il évite le bavardage (mais peut parler de ce qui a trait au chemi­ne­ment spirituel).

L'irréprochabilité

Qui dit vertueux dit irréprochable. Oui, mais pas aux yeux des autres ! Car les yeux d'un esprit sale verront de la saleté partout, même chez le plus sain des saints. Nous sommes nombreux à nous méprendre sur l'irré­pro­cha­bi­lité, que nous con­fon­dons avec le désir de donner une bonne image de soi.

Si vous manquez de vigilance, vous tom­berez dans ce piège fré­quent qui con­siste à tra­vailler pour son ego. De la sorte, en dépit de votre volonté de bien faire, vous ne récol­terez qu'un champ de frus­tra­tions et de souf­frances.

Riez des critiques, faites fi des regards et agissez seule­ment selon ce que vous savez, au fond de vous, être juste, sain et honnête. Cessez de nourrir l'image à donner. Au contraire, investissez-vous plei­ne­ment dans le lâcher-prise, voie rapide vers la sagesse. Devenir irré­pro­chable commence par admettre ses fautes et accepter l'idée que les autres puissent ne voir que cela.

L'humilité est la porte d'entrée de l'irrépro­chabi­lité. Mais attention, il y a aussi de nom­breuses portes de sortie, dont le désir de paraître juste, ou pire encore : celui de paraître humble.

Pour qui, alors, convient-il d'être irré­pro­chable, si ce n'est pas pour les autres ? Pour vous, bien sûr, car vous seul(e) avez besoin de savoir ce qu'il reste à nettoyer pour vous libérer.

Ainsi, si vous voulez vous aider à devenir irrépro­chable, faites comme si les autres ne devaient pas le savoir ! Quoi qu'il en soit, plus vous vous purifiez, plus les êtres enclins au déve­loppe­ment spi­rituel seront sensibles à votre aura et connaîtront le bonheur de puiser inspira­tion et motiva­tion dans votre exemple.

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